
En 1877, John Smith est condamné à cinq ans de travaux forcés pour escroquerie auprès de femmes dans le besoin. À partir de 1888, le professeur Adler Beck étudie les glaciers et l’influence du soleil, des volcans et des courants marins sur les changements climatiques. Son frère jumeau, Adolf, parcourt le monde et les scènes d’opéra d’Amérique du Sud.
En 2050, Chad Ramsey se voit évincé de son poste de profileur pour la police. Son frère jumeau Gregory traverse l’Europe pour couvrir les migrations et les conflits liés au réchauffement climatique. Partout les côtes reculent et la chaleur, les tempêtes et les invasions d’insectes désorganisent les sociétés et tuent les plus fragiles.
Comme Kim Stanley Robinson dans sa série Capital Code, Christopher Priest développe l’idée d’un refroidissement soudain du climat à cause d’une perturbation importante de la circulation océanique de l’Atlantique Nord. Si cette thèse est aujourd’hui considérée par les spécialistes comme peu probable au vu de l’évolution des choses, elle est tout de même sérieuse et l’auteur s’emploie à expliquer pas à pas comment la science nous mène à cette idée, au point qu’une partie du roman se lit comme un discours sur la vulcanologie, la glaciologie ou la climatologie, toutes sciences qui naissent ou prennent consistance au cours du XIXe siècle.
Mais là n’est qu’un aspect de cet ouvrage qui, si son résumé ressemble à une longue énumération de faits totalement indépendants, parle aussi bien de notre actualité que de l’affaire Beck, qui marqua lourdement l’histoire judiciaire britannique, ou évoque la description d’un monde aux prises avec une nature chamboulée comme celle de la société pendant la révolution industrielle, ou mêle le récit de science-fiction, avec une technologie des plus avant-gardistes, aux faits divers de la fin du XIXe siècle.
Les romans de Christopher Priest vont ainsi du fantastique (que l’on songe à la fin du Prestige) à la science-fiction, et développent un questionnement continu sur l’incertitude face à la réalité, la superposition des fictions et de l’histoire, ou la fascination de la gémellité. S’il est comparé à Philip K. Dick, alors il serait un Dick davantage rêveur et contemplatif ; sa prose est plus limpide, ses paysages plus fournis, ses effets moins dramatiques, en apparence.
À l’instar de Chad Ramsey dans le roman, Christopher Priest s’interroge sur les hasards et les coïncidences, ces événements qui rebutent tant l’esprit humain. Faut-il voir des signes partout ? Est-ce que le rapprochement des actions de deux fratries de jumeaux à près de deux siècles de distance peut avoir une signification particulière ? Contrairement aux complotistes de tous poils, lui s’en émerveille. Et s’il faut voir dans ces concordances étranges la manifestation d’un créateur, c’est bien celle de l’auteur qui sait faire naître des émotions de ses manipulations et ajoute encore un très beau récit à son œuvre.
Chronique de David ‘1934’ Soulayrol
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4.7
Comme Kim Stanley Robinson dans sa série Capital Code, Christopher Priest développe l’idée d’un refroidissement soudain du climat à cause d’une perturbation importante de la circulation océanique de l’Atlantique Nord. À l’instar de Chad Ramsey dans le roman, des actions de deux fratries de jumeaux à près de deux siècles de distance peut avoir une signification particulière. L'auteur sait faire naître des émotions de ses manipulations et ajoute encore un très beau récit à son œuvre.
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