Que vous soyez mangaphile ou juste curieux, cet ouvrage est hautement recommandable.
D’abord car son autrice, Laura Montero Plata est une spécialiste universitaire, forte déjà de plusieurs ouvrages sur des réalisateurs japonais, tels Hayao Miyasaki, bien sûr, mais aussi Isao Takahata et Satoshi Kon.
Ensuite parce que, au-delà de la simple admiration, Laura Montero Plata décortique Princesse Mononoké par rapport à l’histoire du Japon, nous révélant le discours, plus ou moins caché, du réalisateur Hayao Miyasaki. Or, pour l’immense majorité des spectateurs et spectatrices d’Occident, ce propos nous échappe complètement.
De manière parfois un peu ardue, avec une pugnacité qui fait plaisir, l’autrice impose une démarche d’historienne particulièrement pointue. Elle n’hésite pas à indiquer ses nombreuses sources et les nombreuses versions des légendes auxquelles Miyasaki se réfère.
La plus importante est ici sa volonté de combattre cette idée que le Japon a toujours été composé d’un peuple unique, comme une unité nationale préhistorique qui, jusque chez nous, n’apporte jamais rien de bon.
Après avoir présenté l’équipe créatrice de Princesse Mononoké et l’élaboration de son histoire, la chercheuse revient en détail sur les influences et les thèmes qui ont inspiré le cinéaste japonais, qui s’avère être un fin connaisseur de l’histoire de son pays, mais aussi un écologiste, dans le sens amateur et conscient de tout ce que l’être humain doit à la nature, tout comme un féministe convaincu.
À travers la description des personnages principaux du film, Laura Montero Plata étaye et confirme sa théorie. On y découvre aussi la révélation du travailleur dingue qu’est le réalisateur nippon. Il a ainsi lui-même dessiné ou redessiné plus de 80 000 dessins ! Rien d’étonnant à ce qu’il ait souffert ensuite d’une inflammation des tendons de la main droite !
La partie consacrée à la promotion du film détaille le travail exceptionnel du producteur de Ghibli Toshio Susuki, seule personne capable de s’opposer à Miyasaki. C’est ainsi lui qui est parvenu à imposer le titre du film.
Le texte, je l’ai précisé, est parfois un peu ardu, tant il s’efforce à recenser toutes les versions des légendes et connaissances historiques. Les illustrations, toujours d’excellente qualité, sont cependant presque trop peu nombreuses. Elles permettent en effet d’égayer un peu les propos passionnants, certes, mais arides pour un occidental ignorant.
Chronique de Vincent ‘1379’ Delrue