La critique du tome 11 d’une saga est un exercice difficile, surtout lorsqu’il s’agit de La Roue du Temps de Robert Jordan. En effet, ce “ […] véritable best-seller a fait de Robert Jordan l’auteur le plus suivi par les amateurs de fantasy à travers le monde ”, dixit la quatrième de couverture. La tâche se complique d’autant plus que ce tome 11 couvre en réalité la première moitié du livre six en version originale (Lord of Chaos), mais j’y reviendrai.
Pour ceux qui connaissent déjà la série, voici un petit aperçu de la situation : Depuis que Rand, le Dragon réincarné, a tué Rahvin le Réprouvé, le climat s’est déréglé sur les royaumes, la chaleur persistant au-delà du possible, asséchant la campagne et laissant deviner l’empreinte du Ténébreux. Perrin, l’apprenti forgeron, est devenu presque malgré lui le Seigneur des Deux Rivières, alors que Mat, le troisième larron, est maintenant à la tête d’une armée, la Bande de la Main Rouge. Tous deux sont liés à Rand, par les liens de l’amitié et ceux qui lient les ta’veren, de ceux que tisse la Roue du Temps. Du côté des personnages féminins, Nynaeve et Elayne sont toujours à Salidar, Acceptées parmi les Aes Sedaï rebelles. Elles maintiennent secrètement captive Moghedien, une des Réprouvées, grâce à un a’dam Seanchan.
Je crains fort que cette présentation ne soit incompréhensible pour tous ceux qui n’ont pas déjà pénétré dans cet univers. Malheureusement, compte tenu du nombre de personnages, de peuples, de concepts, et des milliers de pages qui précèdent, résumer ce livre en quelques lignes relève de la gageure. Je me contenterai donc d’ajouter que La Roue du Temps décrit un univers de fantasy extrêmement riche, loin d’être manichéen, et c’est un plaisir de le découvrir petit à petit. Les héros sont eux aussi très intéressants, partis de tout en bas et propulsés sur le devant de la scène de l’Histoire. L’évolution (rapide) de leur place dans l’échelle du pouvoir s’accompagne, avec un certain décalage, d’une évolution de leurs mentalités, à mesure qu’ils s’aguerrissent et perdent leurs illusions de jeunesse. En bref, c’est du bon, du très bon, et vous pouvez y aller les yeux fermés !
Deux regrets, toutefois, sur la version française : D’abord, il semble que ce soit une coutume en France de tronçonner les ouvrages étrangers dépassant cinq cent pages, ce qui est dommage dans le cas présent car dans la plupart des volumes de La Roue du Temps, l’auteur nous tient en haleine pendant les huit cent premières pages, et concentre la résolution de l’action dans les cent ou deux cent dernières. Donc, si on coupe à la moitié, on casse complètement le rythme du livre. On obtient un premier livre où il ne se passe pas grand chose, et un second qui croule sous une cascade de révélations et de retournements de situations. Ensuite, j’ai relevé çà et là quelques traductions discutables. Par exemple, réduire les Wise Ones du peuple Aiel à des “Sagettes” me choque un tantinet, et l’appellation “javelot électrique”, pour shocklance, me semble déplacée.
Mais ces petits défauts ne doivent surtout pas vous dissuader de plonger dans cette excellente saga. Je me demande juste quel scénariste osera en faire l’adaptation au cinéma, quand La Roue du Temps sera devenue un monument incontournable…
Chronique de David ‘1098’ Monchaux
Éditeur | Rivages |
Auteur | Robert Jordan |
Pages | 450 |
Prix | 21,95€ |
Nous en pensons ...
Notre avis
3.9
Un univers de fantasy extrêmement riche, loin d’être manichéen