Les super-héros ont raccroché leurs costumes et se sont retirés les uns dans les affaires, les autres dans le monde du spectacle, d’autres vivent tous simplement de leurs rentes ou sont en retraite.
Certains sont morts comme Robin, d’une manière sordide, quelques années plus tôt. Et c’est la mort de Batman dans des conditions troubles qui déclenche la suspicion qu’un tueur s’attache à les éliminer un par un, en les frappant dans ce qu’ils ont de plus intime, leur comportement sexuel. Le prochain sur la liste pourrait être l’ancien leader des Quatre fantastiques, Red Richards, à moins qu’il ne s’agisse de Mystique. Comme les précédentes victimes, ils ont reçu de mystérieux messages et sont mis en garde par un policier, Denis de Villa, tandis que son frère, Bruce, journaliste, couvre l’affaire.
Sous un titre apparemment léger se cache une sombre histoire. Les super héros vieillissent, même Superman, et sont en proie, comme chacun, aux doutes, aux affres de la libido, aux crises diverses, à la maladie, à la dépression et à la douleur face aux accidents de la vie. Qui ne s’est jamais demandé comment cela pouvait se passer dans l’intimité, si on possède un super pouvoir comme un corps élastique, le changement de physique à volonté ou encore le pouvoir de se dédoubler. Est-ce un avantage, une malédiction ?
Finalement ces héros sont très proches du commun des mortels avec leurs fantasmes, leurs crises de la soixantaine ou leurs absences de libido. De plus l’héroïsme n’est plus à la mode, même si il y a toujours des mutants doté de pouvoirs, ils ne font plus rêver et l’altruisme semble devenu une denrée rare. À destination d’un public averti, on est très loin des récits pour adolescents, et certaines scènes pourraient choquer des lecteurs trop jeunes. L’auteur livre un texte relativement sombre divisé en quatre parties et un épilogue, qui suivent respectivement une partie de la vie de Red Richards alias Mister Fantastic, Batman, le journaliste Bruce de Villa, Mystique et enfin Superman. Il n’est pas nécessaire d’avoir dans sa jeunesse suivi les aventures de ces différents personnages en bande dessinée pour suivre ce récit, car l’auteur est suffisamment explicite pour faire comprendre la situation au lecteur.
Avec un style réaliste et corrosif, l’auteur dépeint sans concession les affres de ses personnages n’hésitant pas à faire descendre ces héros de leur piédestal. Par exemple « Namor, prince des mers », déjà pas mal arrogant en bande dessinée, devenu présentateur limite insupportable d’un talk show dans un bocal, pardon un aquarium. Ou encore Batman en quête de perpétuelle jeunesse aussi bien féminine que masculine, narcissique, aux fantasmes qui ne sont pas sans rappeler certaines actualités. Certains crieront peut-être au crime en voyant ces personnages ainsi désacralisés, mais ceux-ci n’en deviennent que plus humains, plus proches de nous. Alors est-ce vraiment la fin des héros avec un grand H pour n’avoir pu s’adapter aux changements du monde et de la société ? Ce n’est pas certain.
Chronique de Jean-Paul ‘1266’ Moro
Éditeur | Gallimard |
Auteur | Marco Mancassola |
Pages | 545 |
Prix | 23,65€ |
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Notre avis
4.0
Avec un style réaliste et corrosif, l’auteur dépeint sans concession les affres de ses personnages n’hésitant pas à faire descendre ces héros de leur piédestal.