Exilé loin d’Almenarc’h, ville tentaculaire au centre du monde connu, Erkan se réveille au beau milieu de nulle part, totalement amnésique. Mais alors que de mystérieux tueurs tentent de l’assassiner, le jeune homme se découvre d’une force incroyable et d’une impressionnante dextérité au combat. Il part donc en quête de ses origines, sans se rendre vraiment compte de ce qu’il représente pour le pouvoir en place…
Voici bien un résumé difficile à écrire, tant les intrigues sont nombreuses. Je me suis limité à une seule, celle qui m’a paru non pas la plus importante, mais plutôt celle correspondant le mieux aux canons de ce que l’on nommait jadis « Heroic Fantasy ». Erkan est un guerrier qui se révèle durant des combats qu’il remporte avec une certaine facilité. Cependant, ce roman est tout sauf centré sur ce seul héros, même si c’est peut-être celui qui nous semble le plus attachant, parce qu’à la recherche de son identité. Le plus frappant dans l’entame de ce premier roman, c’est l’ambition du projet littéraire de Feldrik Rivat, tant sur le fond que sur la forme. Chaque chapitre s’ouvre avec le nom d’un des nombreux personnages que l’on va suivre durant quelques pages et l’on entre dans l’esprit de chacun d’eux (par l’emploi systématique de la première personne du singulier). Bon, je dois bien avouer que c’est peut-être là un des points les plus faibles de ce livre. N’est pas Roland C. Wagner qui veut. Je m’explique. Cette façon d’alterner les chapitres en mettant en scène différents personnages à la première personne, ça m’a tout de suite fait penser au sublime Rêves de Gloire, où Wagner ajoutait au procédé une difficulté supplémentaire en ne nommant jamais les différents protagonistes (Alain Damasio l’avait aussi utilisé dans La Horde du Contrevent). Seulement voilà, là où l’écrivain confirmé (trop tôt disparu, durant l’été 2012) s’en sortait parfaitement avec une œuvre polyphonique maîtrisée de bout en bout, l’auteur débutant peine a faire vivre toutes les voix avec une égale qualité. Certains personnages sont très bien réussis (Erkan, déjà cité, ou bien le terrible roi Alkar), alors que d’autres ne sont pas parvenus à me rendre compréhensible leur réalité. Heureusement pour la lecture, cette faiblesse est largement compensée par la force du style de Feldrik Rivat. L’auteur sait à merveille développer une langue riche, très évocatrice et plutôt efficace.
De cette efficacité que pouvait mettre en œuvre, en son temps, un certain Robert E. Howard dans les descriptions des combats de son célèbre Cimmérien. Il y a aussi du Jaworsky dans la richesse de cette écriture. Sans atteindre la perfection de l’écrivain lorrain, Feldrik Rivat semble avoir ce même goût pour le mot juste que l’on place exactement au bon endroit, au bon moment. Alors, même si on n’adhère pas à toutes les intrigues mises en place par l’auteur de façon fort ambitieuse, on suit avec grand intérêt les histoires les plus fortes, les plus immersives. Malheureusement, je me suis peut-être embrouillé les pinceaux et ne suis pas sûr d’avoir tout compris. Après, nul doute que les parts d’ombre qui demeurent à la fin de ce premier tome s’éclairciront à la lecture du deuxième, Les larmes du désert (paru chez J’ai lu en mai 2016).
En attendant, je ne peux que vous conseiller de vous plonger dans ce premier roman, pas tout à fait à la hauteur de l’ambition de son auteur, mais qui a le mérite de vous plonger dans un monde d’une grande beauté. À la fin de l’ouvrage, on peut même trouver les traditionnelles cartes que tout bon roman de Fantasy se doit de posséder. Sauf que là, les deux cartes (une de la ville et une autre, d’une beauté renversante, qui représente le monde) ont été réalisées par l’auteur lui-même. À mon humble avis, on n’a pas fini d’entendre parler de Feldrik Rivat.
Chronique d’Antoine ‘1589’ Chalet
Nous en pensons
Notre avis
3,4
En attendant, je ne peux que vous conseiller de vous plonger dans ce premier roman, pas tout à fait à la hauteur de l’ambition de son auteur, mais qui a le mérite de vous plonger dans un monde d’une grande beauté.