Tom Webster, la quarantaine, professeur dans un collège en Angleterre, est marié depuis treize ans lorsque survient le drame : la mort accidentelle de son épouse aimée Katie. Tom perd pied, quitte brusquement le collège et part pour Jérusalem, ville que les époux s’étaient toujours promis de visiter ensemble. Il y rejoint Sharon, une fille avec qui il a eu une liaison lorsqu’il était adolescent et qui, depuis, était devenue la meilleure amie de la défunte.
A partir de là, le lecteur est entraîné à la suite de Tom Webster dans deux directions. Il accomplit une remontée vers le passé au fur et à mesure que Tom veut bien se livrer et s’avouer des choses qu’il préfèrerait refouler. Car tout ne semblait pas aussi harmonieux dans le couple modèle formé par Tom et Katie. Manifestement, Tom se sent coupable. Il cherche tantôt dans la psychanalyse, tantôt dans le mysticisme, des explications et un apaisement à son malaise. Malgré ses efforts et ceux de ses proches, le mal croît pourtant inexorablement jusqu’à la crise.
Il faut dire que les événements qui surviennent dans la Ville Sainte – seconde direction dans laquelle sont entraînés le lecteur et le héros – ne font qu’ajouter à la confusion intérieure de Tom. A peine arrivé à Jérusalem, il reçoit d’un vieux Juif des fragments de parchemin. Leur traduction effectuée par un ami arabe de Sharon apporte de surprenantes révélations sur l’orientation prise par le christianisme aux tous premiers temps de son existence (1).
Les deux trames narratives se mêlent alors pour donner corps à une réflexion passionnante autour des rapports qu’entretiennent le sexe et la religion en abordant aussi des sujets comme le désir, le deuil, la culpabilité…
Graham Joyce inscrit son récit dans le contexte socio-politique marqué des années 1990 et donne ainsi de Jérusalem une représentation qui semble juste : les extrémismes affleurent et un rien peut les enflammer. Mais la ville est surtout pour l’auteur, comme il le dit lui-même, « un emblème représentant la source de tous les maux ; le cœur humain, avec son pouvoir infini pour se tromper lui-même et son imagination qui, un jour, serait peut-être l’instrument de sa salvation. »
Roman psychologique et roman fantastique, roman métaphorique et roman à lire au premier degré, Requiem est une réussite totale (avec une réserve toutefois pour la traduction : le mot « salut » aurait été préférable à celui de « salvation » !)
(1) En effet, on n’est pas très loin du Da Vinci Code ! Dans les deux romans Marie-Madeleine, figure biblique décidément à la mode, joue un rôle central. La comparaison des deux romans n’est pas à l’avantage du best-seller. Requiem est largement antérieur au Da Vinci Code : paru en 1995 il a été publié une première fois en France en 1996 dans la collection Terreur (pour cette fois mal nommée !). Le style de Joyce est beaucoup plus riche que celui de Dan Brown. Enfin et surtout, les “révélations” de Requiem, d’un intérêt égal à celles du Da Vinci Code, prennent toute leur valeur parce qu’elles entrent en résonance avec les préoccupations du héros.
Chronique de Damien ‘1467’ Didier-Laurent
Éditeur | Bragelonne |
Auteur | Graham Joyce |
Pages | 310 |
Prix | 20€ |
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Notre avis
4.7
Roman psychologique et roman fantastique, roman métaphorique et roman à lire au premier degré