Il serait trop long de résumer les 3 volumes précédents (chacun comportant deux tomes avoisinant les 600 pages), si bien que je vous renvoie au compte rendu qu’en a déjà donné dans nos pages Olivier Bourdy, dans le Présences d’Esprits n°101. Incidemment, si vous souhaitez entamer la lecture de ce cycle – ce que je vous conseille vivement, surtout si vous avez encore des vacances à prendre –, inutile de lire plus avant.
Quand débute Rythme de guerre, un an s’est écoulé depuis l’arrivée de la Tempête Éternelle propulsée par Abjection et la chute d’Alethkar. Les Parshendis éveillés sont désormais menés par les Fusionnés, ces êtres millénaires en guerre contre les Humains depuis des temps immémoriaux.
Tout comme les Radieux, ils maîtrisent de puissants pouvoirs grâce au contrôle des Flux. Malgré les efforts de Dalinar Kholin – qui s’est lié au Père-des-tempêtes – et de ses Chevaliers Radieux pour repousser les Néantifères, la guerre s’enlise. Le plus gros allié de Dalinar est le roi Taravagian, qui est aussi le traître qui a favorisé les visées d’Abjection en échange de la survie de son peuple.
Kaladin Béni-des-foudres commande les Chevaliers Radieux marchevents, mais peine de plus en plus à tenir son rôle de guerrier semant la mort, incapable de protéger tous ceux qu’il voudrait. La mission de sauvetage de tous les habitants de sa ville natale lui en fournit une nouvelle preuve. Ses Marchevents affrontent de plus en plus de Fusionnés, tandis que dans les rangs humains, on trouve de moins en moins de sprènes d’honneur pour se lier à un humain et ainsi grossir les rangs des Radieux.
Shallan, de son côté, jongle tant bien que mal avec ses personnalités alternatives, Voile et Radieuse, incapable d’affronter les souvenirs qu’elle a décidé d’oublier, persuadée qu’elle est un monstre que tout le monde abandonnera, Adolin Kholin le premier, dès qu’elle laissera échapper la vérité. Navani Kholin, dans les rares heures qu’elle parvient à dérober à la gestion d’Urithiru – l’immense tour située dans les montagnes au cœur de Roshar, bien au-dessus du niveau des tempêtes –, se consacre à la recherche de nouvelles applications pour les fabriaux. Elle a ainsi réussi à faire construire par ses ingénieurs une sorte de vaisseau volant, dont l’efficacité se voit confirmée lors du sauvetage de la population de Pierre-d’Âtre, malgré son coût prohibitif en ressources.
Néanmoins, il reste tellement de choses à comprendre sur les secrets des gemmes, des fabriaux, de la fulgiflamme, des sprènes, de Shadesmar et d’Urithiru même ! De son côté, la Dernière-qui écoute, la Parshendi Venli, qui a accueilli un sprène d’honneur, lequel maîtrise son Cœur-de-gemme, la soustrayant en partie à l’emprise d’Abjection, est devenue la Voix d’une puissante Fusionnée. Elle se demande si ses nouveaux maîtres ne seront pas pires que les humains qu’elle abhorre.
Moash, ancien compagnon de Kaladin a définitivement choisi son camp et œuvre aux côtés des Parshendis, grâce à un rapport privilégié avec Abjection qui l’a libéré de ses chaînes. Ce nouvel opus tient ses promesses et les fils de l’intrigue continuent à tisser leur trame inexorable vers une situation de plus en plus catastrophique pour le camp humain.
Malgré le nombre important de protagonistes et de points de vue, l’ampleur de la fresque tient en haleine, notamment grâce à des chapitres assez courts. Par ailleurs, comme dans les précédents volumes, les têtes de chapitre à eux tous ajoutent un nouveau fil narratif, qui élargit encore la perspective, de sorte que plus on avance dans la lecture et plus on se demande si, au final, tout cela ne serait pas bel et bien de la SF !
Les personnages quant à eux évoluent, s’approfondissent, se remettent en question. Si l’on peut regretter que certaines choses, certains termes qui n’étaient qu’à peine évoqués semblent désormais presque évidents, l’ellipse d’un an entre la fin de Justicière et le début de Rythme de guerre permet de le justifier. La complexité et la richesse de l’univers imaginé par Brandon Sanderson ne se démentent pas, et cela sans que la cohérence en pâtisse, au contraire.
De nombreuses questions sont abordées avec justesse et profondeur, si bien que s’entrelacent les destins personnels et les péripéties, pour rendre la lecture encore plus prenante, malgré l’ampleur un peu folle de ce cycle romanesque. Quand on sait qu’il doit compter 5 volumes, et qu’un second cycle de 5 autres est prévu, on ne peut que se réjouir et se demander : mais jusqu’où ira-t-il, ce foudre d’écrivain ?
Chronique de François ‘767’ Manson