Ce roman, du genre « fiction spéculative-hard science », publié en 1986, a reçu le prix John W. Campbell en 1987. Pourquoi n’est-il pas traduit en français ? (Je me propose !) Il est toujours temps de le faire, je ne pense pas que les lecteurs le trouveront dépassé.
Au contraire. La pensée de Joan Slonczewski est tournée vers la vie. Elle se pose plusieurs questions, comme : et si le monde avait été modelé sur une pensée de femme, à quoi pourrait-il ressembler ? (Pour réussir cet exploit, ce monde est devenu entièrement féminin…)
Que se passerait-il si ce monde et celui, mixte, auquel nous sommes accoutumés, se rencontraient ? Et elle nous raconte sa version. Biologiste et chercheuse, cette autrice s’est plongée professionnellement dans la complexité, la diversité et l’interdépendance des formes de vie. Sa participation au mouvement des Quakers a développé en elle l’humilité et le questionnement de soi-même, ainsi que la révérence pour la vie.
C’est une militante de la non-violence. Ces fortes influences nourrissent ses romans. A Door Into Ocean, premier volume de la trilogie Elysium Cycle, est une œuvre complète. Le lecteur voyage sur cette planète entièrement constituée d’un… océan ! avec les Sharers (« celles qui partagent »), ces femmes dont les ancêtres lointaines ont choisi d’utiliser leur science pour s’adapter à la planète plutôt que de terraformer celle-ci, mais aussi avec quelques male freaks (« phénomènes masculins »), pas tous mauvais !
Il est rare de rencontrer en SF l’exploration de possibles biologiques aussi poussés et intéressants que dans l’œuvre de Joan Slonczewski. Son style d’écriture est simple et précis, expressif, évoquant bien les idées qui nous sont exposées ; l’action est rythmée. La fin est un peu hâtive… Ce roman nous propose de bout en bout des pistes de réflexion, par exemple : qu’est-ce qu’être humain ? Entre mourir pour vivre ou vivre en étant mort : lequel est pire ? Quelle est l’utilité de la peur pour notre survie ?
Chronique d’Amanç ‘1869’