« Version Beta » de Rachel Cohn

Dans une île paradisiaque résident les familles qui possèdent les plus grandes fortunes de la planète. Paysages faits sur mesure, air euphorisant, tout est fait pour leur apporter un confort et un train de vie frisant la perfection.

Pour les servir, entretenir l’île, les jardins, faire divers travaux et s’occuper d’eux, des clones ont été créés, à partir de personnes décédées, à leur image mais sans âme, ne ressentant rien, programmés pour obéir et servir leurs propriétaires sans se poser de questions et sans velléité de contestation ou de revendication.

Jusque là seuls les modèles adultes existaient, mais un nouveau type de clone vient d’être mis sur le marché, le clone adolescent. Elysia est un prototype, une version Beta, c’est-à-dire à l’essai, elle est née à l’âge de seize ans. C’est une première, car les adolescents sont considérés comme ingérables, de caractère trop instable.

Elle est achetée par un couple dont la fille est partie pour le continent et qui s’ennuient.

Elysia est un modèle parfait physiquement, de bonne éducation, elle sait toujours quoi dire pour faire plaisir à chaque membre de la famille qui l’a acquise. Elle se sent heureuse d’être dans une maison où elle est considérée comme la fille du couple. Elle hérite d’un frère et d’une petite sœur et tout est rose.

Et puis quelque chose l’inquiète, elle qui ne devrait rien ressentir se trouve troublée par quelques bouchées de nourriture qui lui plaisent particulièrement, des sensations qui lui font peur, ne serait-elle pas une « défaillante », ce genre de clones qu’on est obligé de reprogrammer ou qui disparaissent. Elle se surprend à ressentir de l’émotion, de la colère, toutes sensations qui ne devraient pas exister pour elle.

Puis il y a ces flashes d’une vie antérieure, qui lui reviennent : la mémoire de la défunte qui lui a permis d’être créée n’a-t-elle pas été effacée ?

Peu à peu elle se rend compte que le monde où elle vit n’est pas si parfait que ça. Puis elle commence à ressentir une passion pour le beau Tahir, le fils d’une famille voisine. Et il y a ces clones défaillants qui pourraient bien apporter l’anarchie à cette petite île bien tranquille…

Si ce premier volume de la tétralogie n’apporte pas de grande révolution sur le thème du clone ou du robot qui devient humain, il y a un certain intérêt à suivre le parcours du personnage principal dans sa découverte des divers plaisirs et sensations qui font l’humanité.

L’évolution d’une vie de rêve se transformant en cauchemar se fait en douceur, vue par des yeux d’adolescente. Le récit, collection jeunesse, est tout en retenue. Il n’y a aucun mot ni aucune scène vraiment choquante, même s’il y a de la violence, tout est lissé et convenu (un peu trop, peut-être). Mais les personnages sont assez bien décrits pour être crédibles, l’histoire est intéressante et les coups de théâtre, nombreux, relancent l’intérêt et préparent la suite de ce premier tome.

Un bon livre romantique de science-fiction jeunesse, qui se laisse lire facilement, même s’il ne restera pas comme un classique impérissable.

Chronique de Jean-Pierre Binet

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