Rencontre avec Thomas Fouchault – Les Éditions 1115

Éditions 1115 : Entretien avec Thomas Fouchault

Présence d’Esprits : comment perçois-tu la place de la maison d’édition 1115 dans le paysage de la SFFF en France ?

Thomas Fouchault : Les Éditions 1115 sont spécialisées dans les littératures de l’imaginaire en petit format. À ce titre, nous occupons une place assez particulière dans les rayons avec nos confrères du Bélial (Une Heure Lumière), du Passager clandestin (Dyschroniques), et depuis peu, d’Argyll (RéciFs). Nous sommes une petite maison d’édition, mais nous avons la joie de voir que nous faisons notre place, année après année, et que nous avons de plus en plus de lecteurs prêts à plonger dans nos petits livres !

PdE : Si tu devais résumer ta ligne éditoriale en une phrase, que dirais-tu ?

T.F. : Nous sommes une Agence de voyages littéraires et vous proposons différents titres d’imaginaire pour vous faire voyager ailleurs, loin du quotidien, pour découvrir d’autres histoires et d’autres temps, et en revenir avec des souvenirs plein la tête, ainsi que des sujets de réflexion dans vos bagages.

PdE : As-tu des collections spécifiques ?

T.F. : Nous avons trois collections pour trois types de « voyages littéraires » différents. Chronologiquement, nous avons commencé par développer la collection Novellas, qui
présente des textes d’une centaine de pages dans un format 11 x 15 cm facile à glisser dans la
poche pour partir à l’aventure. Puis nous avons lancé la collection ChronoPages, qui présente
des nouvelles à l’unité de 32 pages pouvant être lues en 30 mn – de quoi ménager des pauses
lectures dans un quotidien bien occupé ou s’évader le temps d’un trajet en transports en
commun. Enfin, notre collection Longs-Courriers en grand format contient d’énormes coups
de cœur qui ne tenaient pas dans nos petits écrins, et qui peuvent entrer dans vos valises pour
des voyages au long cours !

PdE : Qu’est-ce qui t’a amené à travailler dans ce domaine ?

T.F. : J’ai découvert le milieu de l’édition en tant qu’auteur. En effet, j’ai d’abord été publié aux
Éditions 1115 en 2019 avec ma novella Les fileurs de temps. Le temps passant, nous nous sommes trouvés des complémentarités dans nos façons de travailler et une même ambition littéraire avec Frédéric Dupuy, le fondateur de la maison d’édition. Il m’a proposé de nous associer, et c’est ainsi que nous avons refondu la structure en 2021 en tant que co-éditeurs.
J’ai appris beaucoup de choses sur le tas, mais c’est un plaisir de travailler des deux côtés du
stand.

PdE : Combien de personnes collaborent avec toi et parmi elles, combien sont
salariées ?

T.F. : Nous sommes quatre associés : Frédéric Dupuy, co-éditeur et fondateur de la maison d’édition, ainsi que nos conjoints respectifs qui sont impliqués dans la sélection des textes, le travail des couvertures et la représentation de la maison d’édition en salon.

PdE : Quelles parties de la production externalises-tu (corrections, maquettes, illustrations, etc.) ?

T.F. : Nous fonctionnons sur une petite économie et n’externalisons que les impressions. Depuis sa création, la maison d’édition fonctionne sur un mode artisanal : nous avons la chance d’avoir une grande palette de compétences en interne et nous appuyons dessus pour réaliser le plus de tâches possibles nous-mêmes. C’est ainsi que toutes les couvertures sont faites « maison », en travail photographiques retouché, avec les contraintes de créer des ambiances avec des éléments que nous avons sous la main. Cela demande de la créativité et de la flexibilité, et c’est bien ce qui nous plaît dans notre métier.

MODE DE SÉLECTION DES TITRES

PdE : Acceptes-tu uniquement des auteurs francophones ou édites-tu aussi des textes traduits ?

T.F. : Nous ne publions que des titres d’auteurs francophones pour le moment. C’est l’un de nos principaux objectifs en tant que maison d’édition : montrer ce que les auteurs et autrices contemporains ont dans le ventre, car les anglo-saxons n’ont pas le monopole des littératures de l’imaginaire de qualité.

PdE : Combien de manuscrits reçois-tu en moyenne chaque année et répondent-
ils à ce que tu en attends ?

T.F. : Nous recevons environ 350 manuscrits par an, avec de grandes disparités en termes de maturité d’écriture et de cohérence avec notre ligne éditoriale. Beaucoup de textes restent à la surface de l’action et ne vont pas développer les niveaux de lecture susceptibles de provoquer la réflexion sur des sujets contemporains ou de société. D’autres sont trop ancrés dans les thèmes d’actualité et manquent du recul nécessaire pour les inscrire dans le temps, et assurer qu’ils présentent toujours un intérêt aux lecteurs dans cinq ans ou dix ans. Mais certains textes nous surprennent par leur fraîcheur, leur originalité ou leur traitement particulier des thématiques, et ce sont ces textes-là qui emportent nos coups de cœur.

PdE : Comment est organisée la collecte des manuscrits ?

T.F. : En principe, nous ouvrons notre dépôt de manuscrits chaque année durant l’hiver pour collecter des manuscrits dans nos collections novella et ChronoPages. Je dis bien en principe, car nous avons dû sauter la saison 2024-2025 pour cause d’engorgement du dépôt. Nous devrions avoir traité tous les textes en attente d’ici la réouverture – nous en dirons plus en fin d’année sur nos réseaux.

PdE : Les manuscrits soumis sont-ils d’abord examinés par un comité de lecture
?

T.F. : Tout à fait ! Nous avons mis en place un comité de lecture pour nous assister dans la sélection
des textes. Ce comité fait un premier tri dans les manuscrits et nous fait remonter les textes qui ont emporté l’adhésion. Frédéric et moi faisons ensuite la sélection finale selon nos propres critères et la cohérence du catalogue.

PdE : Comment s’organise le processus de retravail avec les auteurs ?

T.F. : Après nos lectures du manuscrit, nous organisons nos remarques et propositions d’ajustement dans un édito que nous renvoyons à l’auteur ou l’autrice. À partir de là, plusieurs boucles d’échanges s’établissent avec des propositions et contre-propositions permettant de porter le texte vers sa meilleure version possible en cohérence avec les intentions de l’auteur ou l’autrice. Les textes que nous retenons sont généralement bien aboutis, ainsi, le travail éditorial porte rarement sur des restructurations totales du récit.

PdE : Une anecdote à nous raconter ?

T.F. : Les soumissions de manuscrit nous livrent souvent de belles surprises. C’est ainsi que le manuscrit de Traduction vers le rose d’Esmée Dubois nous est parvenu parmi tant d’autres dans notre boîte mail générale, et c’est en le lisant que nous avons réalisé le potentiel fabuleux de ce texte. Deux ans plus tard, il a remporté le Grand Prix de l’Imaginaire en 2024. Ça a été une émotion folle pour Esmée comme pour notre équipe. Comme quoi, les grands prix nationaux ne sont pas réservés qu’aux grandes maisons d’édition, ni qu’aux auteurs installés dans le milieu depuis de nombreuses années !

POLITIQUE DE DIFFUSION

 

PdE : Combien de nouveautés (inédits) publies-tu chaque année ?

Nous publions essentiellement des inédits, avec de 3 à 4 titres dans la collection Novellas et 12 titres dans la collection ChronoPages. Les publications dans la collection Longs-Courriers sont plus irrégulières, de l’ordre d’un titre tous les deux ans.

PdE : Peux-tu nous donner une idée du tirage moyen d’un titre ?

T.F. : Nous tirons les Novellas et les ChronoPages à 300 exemplaires en moyenne dans un premier
tirage. Celui-ci est porté à 500 exemplaires pour les Longs-Courriers.

PdE : Procèdes-tu à des réimpressions ? Des rééditions ?

T.F. : Notre objectif est d’exploiter nos titres sur le long terme. Ainsi, nous faisons régulièrement
des retirages dès que les stocks sont trop bas. La réédition reste exceptionnelle, mais nous
l’avons fait pour notre titre « Dans l’ombre des miroirs » de Marge Nantel qui a été notre titre
de lancement de la collection Longs-Courriers en 2022. Initialement, ce texte était paru dans
notre format Novellas en 2018… ce qui en faisait un pavé certes très beau, mais difficilement
accessible à nos lecteurs presbytes ! Certains autres titres, notamment parmi les ChronoPages,
sont des rééditions de nouvelles parues en anthologie il y a de nombreuses années déjà. Nous
sommes ravis de pouvoir leur redonner une nouvelle vie.

PdE : Quelles sont tes stratégies de diffusion que ce soit en salons, en ligne ou en librairie ?

T.F. : Nous vendons principalement en direct. Beaucoup de commandes transitent par notre site Internet, et nous participons à une dizaine de festivals et de salons du livre tout au long de l’année pour aller à la rencontre de nos lecteurs et lectrices. De plus, la collection ChronoPages a aujourd’hui un mode de diffusion principal en abonnement annuel, chaque
nouveau titre étant expédié aux abonnés à chaque début de mois.
Toutefois, nous traitons chaque semaine des commandes de libraires et voyons notre part de ventes réalisées en librairie augmenter chaque année. Nous établissons de plus en plus de dépôts-vente et de mises en rayon dans les librairies spécialisées, et nous sommes ravis des échanges que nous entretenons avec les libraires. Enfin, nous étudions sérieusement le passage à la distribution-diffusion dans un avenir proche pour augmenter fortement notre diffusion et consolider notre place dans le paysage éditorial français.

PdE : Appliques-tu le dépôt légal des livres et des périodiques auprès de la BNF ?

T.F. : Tout à fait. Nous déposons nos titres pour les obligations légales ainsi que pour le référencement auprès des principales bases de données.

PdE : Tes titres sont-ils proposés sur des formats autres que Broché ? (Poche, audio, numérique…) ?

T.F. : Tous nos titres sont accessibles au format numérique ebook. Nous travaillons également sur des projets d’adaptation en livre audio – nous en dévoilerons davantage le moment venu !

PdE : Quelle est ta présence sur les salons et festivals, et quelle importance
accordes-tu à la communication pour ta maison d’édition ?

T.F. : Nous participons fréquemment aux salons et festivals du livre car il s’agit d’une occasion particulière de proposer nos textes aux lecteurs et lectrices, puisque nous avons une faible présence en librairie. C’est aussi un moyen de rencontrer les auteurs, autrices, bibliothécaires et autres participants à l’écosystème du livre avec qui élaborer de nouveaux projets. La communication est un pilier essentiel pour assurer notre visibilité, mais nous avons encore une marge de progression à ce niveau.

PdE : As-tu des infos exclusives à partager sur de futures parutions ou évolutions
?

T.F. : L’an prochain, nous fêterons les dix ans des Éditions 1115. Il se peut que nous préparions des surprises éditoriales pour marquer ce cap 😉

Découvrir le site des éditions 1115

Découvrez une autre interview de Présence d’Esprits : Rencontre avec les éditions A la Flamme

A propos de Xavier FLEURY

Matelot du fanzine Présences d'Esprits, chargé des demandes de Services Presse pour les nombreux chroniqueurs de la cabine Livres.

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