Votes pour le match d’écriture des Imaginales 2017 : « Et ils pompaient… pompaient… »

Je me départis totalement du choix de ce thème ! On m’a forcé ! En minorité, j’ai du m’incliner et laisser faire. Mais qu’on ce que peut bien écrire sur ce thème…

  • La cérémonie
  • Pentacle et Plomberie
  • Le soleil, la mer, le vent
  • Un sac de bile
  • Un froid fort nécessaire
Contrainte 1
Un être humain normal
Contrainte 2
L’action ne dure que 5 minutes

LA CEREMONIE

Sur les gratte-ciels ou à leurs fenêtres, voire bravant l’éternelle pluie battante sur les grandes plates-formes et passerelles reliant les buildings entre eux, l’immensité de la foule survivante de l’immense ville de Lluvia attendait avidement que la cérémonie démarre.

La survie de Lluvia, leur survie, en dépendait. L’Empereur, Seigneur des Machines et des Âmes, l’avait dit : seuls des volontaires au sacrifice, des volontaires forts et courageux, pourraient activer et faire fonctionner les pompes qui sauveront la ville de ce déluge, de ce trop-plein d’eau qui s’accumulait encore et toujours. Déjà les faubourgs les plus bas étaient complètement noyés, toutes les rues et avenues entre les immenses gratte-ciels n’étaient que des fleuves en furie.

Qu’ils puissent donc pomper et pomper pour l’éternité ou presque, qu’ils deviennent la force de la machine qui enverrait toute cette eau de l’autre côté des montagnes, chez les païens, les ennemis, pour les noyer plutôt que les citoyens de Lluvia et de l’Empire.

Une immense clameur se répandit dans la ville quand l’autogyre aux armes impériales se posa sur la grande plate-forme au centre de la cité, là étaient installées les roues actionnant les pompes, au beau milieu du lac sans fond qu’était devenu la Grande Place de la Victoire.

Descendant de leur véhicule, les Héros de la ville entrèrent en scène. Acclamés les uns après les autres, ogres, troll, nains aux muscles cybernétiques, ou androïdes miniers volontaires, n’entendaient que peu les hurlements de la foule sous le grondement des eaux, mais ils étaient fiers.

Vint le dernier. Un homme, simplement un homme. Même pas trop musclé, vêtu d’un simple pantalon, il ne payait pas de mine. Trempé, il n’avait pourtant pas froid, n’entendait pas les huées et les moqueries. C’est vrai, il ne semblait ni fort, ni endurant, il ne servirait à rien, mais il avait été volontaire et la Cité en avait besoin. Et puis, les humains ne vénéraient pas assez l’Empereur, n’est-ce pas ? Ce déluge était de leur faute ! A défaut de pouvoir faire mieux, la foule se vengeait sur lui. Aux quolibets se joignirent divers projectiles, lancés de bien trop loin pour pouvoir même approcher la plate-forme, mais la foule se déchaîna quand même.

L’Homme n’eut qu’une minute de ce traitement, mais il aurait pu en endurer une heure.

Le technoprêtre – un immense sang-mêlé aux origines diverses – ouvrit les vannes et commença son homélie, mais la première minute fut noyée par la pluie qui redoubla de puissance, comme si les éléments comprenaient qu’on allait saboter leur travail.

Venu de loin dans les montagnes, un écho de fracas, tout en roulements et grondements sourds, atteint alors la ville. Encore un barrage qui lâchait, encore une vague d’eau qui allait engloutir un peu plus Lluvia et faire tomber d’autres bâtiments déjà bien fragilisés. Déjà, une première lame de fond fit vaciller un building éloigné. Tant s’étaient déjà effondrés… Et d’autres n’allaient pas manquer de les rejoindre dans les abysses.

Le technoprêtre reçu un message pas son implant neural. Il grimaça d’inquiétude, et fit signe à son acolyte d’accélérer le mouvement. Il fallait absolument que les machines soient lancées dans trois minutes tout au plus, que le niveau de l’eau ait déjà pu baisser un tout petit peu, sinon la vague relâchée par le barrage allait les balayer pour de bon.

Regroupés par paire autour d’immenses roues de cuivre, aux reflets verts d’oxydation sous la pluie ruisselante, les héros se mirent à tirer et pousser pour les débloquer.

Sous les quolibets de ses collègues, l’humain s’y mit lui aussi.

La première impulsion fut très dure, le métal, la machine résistant face aux efforts. Mais alors que le prêtre et son acolyte incantaient en chantant des louanges à l’Empereur – en version raccourcie, ils n’avaient pas le temps de faire plus – les roues grincèrent et se débloquèrent, alors que la magie, doucement d’abord, puis plus fermement s’ensuite, s’emparait des Héros, des Sacrifiés.

Alors qu’ils continuaient à tourner les roues, lançant ainsi la machinerie des pompes, ils hurlèrent. Leurs âmes résistaient malgré tout, mais elles leurs furent arrachées les unes après les autres, pour servir de carburant à la machine alors que leurs corps, déjà devenus des zombis, des automates, qui poussaient les roues, et pompaient encore et encore.

Seul l’humain résistait. Il était venu ici pour saboter le travail, et comptait résister jusqu’au bout. Hors de question que l’Empereur et ses machines aient son âme ! Non, ils ne la méritaient pas, et si tous les peuples avaient ouvert les yeux au lieu de rester dans leur béatitude aveugle envers l’inhumain seigneur de ce monde, ils auraient compris qu’il suffisait de laisser Lluvia (et l’Empereur) se noyer et d’émigrer sur d’autres terres, de l’autre côté des montagnes, celles sur lequelles ils préféraient envoyer leur trop-plein.

Un tremblement secoua la plate-forme, et le prêtre, qui continuait à chanter, comprit qu’il y avait un problème. La machinerie grippait. Il vit que l’humain résistait. Il n’était pas encore un zombie, son âme se débattait.

Il fit un signe à son acolyte.

Celui-ci hocha la tête. Il s’approcha de l’homme – qui, trop concentré sur sa lutte éperdue, ne le vit pas arriver – et le frappa violemment sur la tête.

Le choc fut tout ce qu’il manquait pour que le rituel raffermisse son emprise sur l’âme du rebelle. Celui-ci hurla, se débattit… avant que son corps ne continue à pousser, pousser, et activer les pompes, qui acceptèrent l’énergie avec gratitude l’énergie apportée par son âme.

Le Technoprêtre regarda sa montre. Un peu moins de cinq minutes depuis que le premier sacrifié avait posé le pied sur la plate-forme.

Il ne lui restait plus qu’à sauter dans l’autogyre avant que la nouvelle vague ne déboule et ne l’emporte.

L’Empereur serait satisfait.

 

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One comment

  1. Je sais que tu es la meilleure

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