Vous êtes tous déjà au courant : le champion d’Europe de go (le Français Fan Hui) s’est fait battre. Eclater. Atomiser. Exécuter. Un blast de 5 victoires à 0 tout de même. Par un ordinateur bien sûr.
Cela nous ramène loin en arrière pour les plus vieux d’entre nous, lorsque Kasparov s’était fait battre par Deep Blue (d’IBM, qui n’avait pas manqué de faire une pub énorme sur cet événement). Il lui aura fallu quand même 6 essais, ne l’oublions pas.
Enfin bon. Avant d’aller plus loin, entre gens de bonne compagnie, nous allons tout d’abord passer sur le fait que l’expression « intelligence artificielle » est totalement galvaudée dans tous les médias où vous avez pu la croiser. On ne sait déjà pas définir l’intelligence humaine, alors de là à oser prétendre la programmer… On se comprend. En revanche, il ne faut pas que cela nous empêche d’admirer les algorithmes utilisés, les capacités d’auto-apprentissage, les modèles récursifs et surtout les directions prises par les équipes. Après cette clarification, continuons !
Ainsi, le logiciel exécuteur d’être humain, AlphaGo (ça fait pas rêver) de la société DeepMind a utilisé une philosophie qui n’est pas du tout basée sur l’exploration de toutes les possibilités et leur sauvegarde en mémoire. Il y en a effet trop de coups possibles au Go pour procéder de la sorte. Les programmeurs ont fait jouer AlphaGo contre lui même un nombre incalculable de fois, et c’est à partir des résultats que le logiciel a « appris » ce qui était un bon choix. L’innovation viendrait aussi du fait que l’algorithme est généraliste, c’est à dire qu’il ne s’applique pas uniquement au jeu de Go (même s’il a été adapté).
Ce qui est très intéressant à travers cette victoire, c’est qu’elle a eu lieu en octobre 2015 et on ne l’apprend que maintenant. Ce qui est encore plus intéressant, c’est que DeepMind appartient depuis quelques temps à la société Google. Ah ! Là on commence à s’amuser ! En réalité, au-delà de l’impressionnant résultat obtenu par AlphaGo, vous assistez en réalité à une véritable guerre froide. Autrefois, le Saint-Graal était entre autres matérialisé par la lune. Maintenant, c’est le Go qui est devenu l’enjeu des super puissances de notre univers moderne : Facebook contre Google. Facebook s’est en effet engagé lui aussi dans la course à la conquête du Go, avec une approche radicalement différente plutôt basée sur les choix qu’un joueur fait face à une « image visuelle » du plateau. Une sorte d’instinct. Bon bah … 1 à 0 Mark, désolé 🙂 Et tant pis pour la grosse campagne de communication entamée il y a quelques mois sur le sujet.
Et ne croyez pas que cette guerre silencieuse ne puisse pas avoir de conséquences sur nos vies futures. Ce n’est pas pour rien que ceux deux monstres du web se sont lancés dans cette bataille. Une guerre froide a toujours plus niveaux de lecture et enjeux, et celle-ci est déjà passionnante.
Si j’étais dans les baskets de Lee Sedo, le champion du monde, j’aurais quelques sueurs … et un grand sourire pour organiser financièrement les événements de 2016 🙂
A suivre !