Au Royaume d’Ethrie, Dextérité Jones, fabricant officiel de jouets pour les dames de la cour, rencontre la princesse Rhian à qui il porte une affection toute paternelle. Cette affection, Rhian en a besoin. Ses frères, héritiers du trône, sont décédés d’une peste fulgurante et son père est mourant. Au Royaume d’Ethrie, les femmes n’ont pas le droit d’accéder au trône. Le chef de l’Église le Prolat Marlan, n’envisage absolument pas cette éventualité. Il est dévoré d’ambition et souhaite ardemment le pouvoir. Pour cela, il veut contraindre la princesse en lui proposant de se marier à un prétendant choisi par ses soins. Mais le Prolat doit composer avec les ducs du royaume, qui ont aussi leurs prétendants.
La Princesse doit donc trouver une solution pour prendre ce pouvoir qu’elle juge lui revenir de droit, en se mariant avec un duc qui la laissera diriger son royaume. Pendant ce temps, Dextérité est hanté par son épouse décédée, Hetti. Elle lui transmet le message divin de sauver l’Ethrie en commençant par délivrer un esclave qui se meurt sur un bateau et se nomme Zandhakar. Dextérité fait appel à son amie, la doctoresse Ursa, pour sauver cet homme du désespoir, de la maladie et de la mort. Alors que tout les sépare (le langage, la religion, le mode de vie), ces trois personnages vont se rapprocher et apprendre à s’estimer.
Loin de l’Ethrie, l’impératrice de Mijak, Fulie, poursuit avec son autre fils, la conquête du monde dans le sang et la mort. Zandhakar, son fils qu’elle a renié et fait torturer, lui manque.
Après avoir menacé Rhian, le prolat Marlan commence à la maltraiter, sous les yeux de son Chapelain Helfred, horrifié. Dextérité, conseillé par le fantôme d’Hettie, met en œuvre l’enlèvement de Rhian. En accompagnant Rhian à travers l’Ethrie, Dexterité, Ursa, Zandhakar, Helfred vont accepter de l’aider à conquérir son trône. Leur périple en direction du duché de Linfoi, sera pour chacun d’entre eux la découverte d’une sorte de quête dont ils prendront peu à peu conscience. Ils pressentent une catastrophe, mais ce n’est pas Marlan la vraie menace : la conquête du monde déclenchée par l’impératrice de Mijak, va tout détruire. Ignorante de ce danger-là, Rhian poursuit son but : destituer le Prolat. Pour cela, Zandhakar lui apprend à se battre et c’est un bon professeur.
Ce monde paisible que nous présente Karen Miller est à des lieux de l’enfer desséché et appauvri de Mijak. L’Ethrie est une société riche, avec un port commercial autonome – Trone – et des duchés verdoyants. C’est une société dont la pratique de la religion est plutôt tiède, implique l’adhésion plutôt qu’un fanatisme sacrificiel comme à Mijak. Dans ce roman, le lecteur est confronté par des rappels, à l’avancée meurtrière des troupes de Mijak ; ce qui met en évidence la fragilité de la paisible Ethrie. On voit aussi les personnalités des acteurs principaux évoluer.
Rhian la princesse gâtée, protégée, doit dépasser son statut d’enfant royale pour devenir une Reine dirigeante. Zandhakar, ancien prince, veuf, esclave à demi mort, est un homme désormais libre, sans pouvoir, sans famille, sans but dans la vie, sauf peut-être celui de faire de Rhian une reine indépendante. Dextérité, incroyant depuis la mort de sa femme, est passé du statut de simple fabricant de jouets à celui de libérateur et accessoirement prophète. Tout au long du roman, Karen Miller choisit d’écrire dans un tempo plus lent que dans son premier tome des « Seigneurs de la Guerre » ; ainsi elle insiste sur l’évolution physique et psychologique de ses personnages.
On comprend mieux combien est douloureuse l’acceptation du changement du point de vue des héros, et cela crédibilise le rythme de l’histoire. L’auteur, dans ce roman, prépare ses lecteurs à voir une femme devenir une reine guerrière pour affronter une impératrice belliqueuse. Et rien ne dit que la sauvage Fulie sera la plus puissante des deux. L’auteur nous invite à découvrir un monde global où se combattent plusieurs divinités.
Ici, Karen Miller présente l’introduction d’un combat final entre deux sortes de monde, deux sortes de dieux et surtout deux sortes de femmes. Elle montre combien les femmes doivent lutter pour leur liberté, dans un monde aliéné à un machisme rétrograde qui s’appuie sur la religion et le pouvoir politique. Mais bien sûr, nous sommes ici, dans une fiction romanesque…
Chronique de Marie-Hélène ‘1264’ Hochet
Éditeur | Fleuve Noir |
Auteur | Karen Miller |
Pages | 607 |
Prix | 24,50€ |
Nous en pensons ...
Notre avis
4.6
Karen Miller nous invite à découvrir un monde global où se combattent plusieurs divinités.