« Replis » d’Emmanuel Quentin

Monteur d’images, Daniel Sagnes nous raconte son quotidien qui consiste à trafiquer sans scrupule des enregistrements vidéo au service de la propagande d’État.

Ce poste lui permet d’habiter en zone protégée et de ne pas trop se poser de questions sur sa vie. Il faut savoir que dans ce futur, depuis que les sols sont imprégnés d’une substance nocive contaminant l’air et décimant toute forme de vie, il est impossible de sortir d’un dôme urbain ou d’une habitation sans équipement à oxygène et combinaison protectrice.

La population, miséreuse, se terre dans des bidonvilles alors qu’une minorité privilégiée et souvent âgée contrôle les derniers vestiges de la civilisation. Daniel Sagnes s’en moque bien et se contenterait de son job si sa pauvre mère ne vivait à l’extérieur de Paris, ce qui l’oblige à négocier avec un caïd local pour sortir de l’enclave sécurisée quand il veut aller la voir. Voici pour le décor, assez sombre, de ce roman initialement paru chez Mü éditions.

Pour ce qui est de l’intrigue, une avancée scientifique vient troubler le confort relatif de Daniel : la capacité à transférer la conscience d’une personne dans le corps de ses descendants, avec la possibilité d’en prendre le contrôle. Cette découverte, nommée l’assimilation, est vite perçue par les classes aisées comme le moyen d’accéder à une forme d’immortalité. Lorsque Daniel apprend que son propre père, qui ne l’a jamais reconnu, envisage d’être « réincarné » en lui, il refuse catégoriquement.

Mais son géniteur occupe un poste si important au gouvernement que notre héros n’a d’autre solution que de s’enfuir loin de Paris pour échapper à l’assimilation forcée. Et lorsque des résistants s’invitent pour assurer sa sécurité, il réalise que sa petite personne représente un enjeu qui le dépasse. Replis pose un monde décrépi rempli d’individus pourris, avec pour narrateur un personnage principal amer et antipathique.

Emmanuel Quentin prônerait-il un genre feel bad en opposition au feel good ? L’auteur ne cherche pas à nous faire apprécier l’antihéros Daniel Sagnes (mal élevé, égoïste, asocial…) pour une raison qui ne sera révélée que dans les dernières pages. Avant cela, le lecteur suivra sa fuite vers Saint-Malo puis l’Europe entière en Tubo (monorail transfrontalier) au travers d’un environnement post-apo somme toute assez classique, mais rythmé par des scènes d’action choc et les revirements de personnages secondaires ambigus à souhait. Un bon moment de lecture.

Chronique de Xavier ‘1762’ Fleury

A propos de Christian

L'homme dans la cale, le grand coordinateur, l'homme de l'ombre, le chef d'orchestre, l'inébranlable, l'infatigable, le pilier. Tant d'adjectifs qui se bousculent pour esquisser le portrait de celui dont on retrouve la patte partout au Club. Accessoirement, le maître incontesté du barbecue d'agneau :)

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