C’est un roman-fleuve qui nous est offert avec Les Seigneurs de Bohen. La fin est annoncée dès le début : il raconte comment l’empire de Bohen est tombé. Et c’est le « comment » qui est le véritable enjeu du roman. Avant l’empire, les Wurms régnèrent sur les hommes pendant des siècles. Selon la légende, cette espèce non-humaine, dotée de pouvoirs surnaturels, fut finalement vaincue par un homme qui sut mener contre eux une rébellion victorieuse, Ardan le Pieux.
Mais au moment d’accéder au pouvoir, celui-ci fut assassiné par ses alliés. Dans son dernier souffle, le libérateur, tel un templier, maudit ses assassins : il souhaite qu’aucune de leurs familles ne règne plus de trois générations. Et quand le récit commence véritablement, nous y sommes, à la fin d’une de ces trois générations ! L’empire devenu tyrannique et décadent est en effet au plus mal : la révolte couve, l’empereur est vieux et se désintéresse de son peuple, et l’impératrice, une puissante sorcière, a de plus en plus de mal à repousser les étranges vaisseaux noirs qui viennent ravager les côtes – on dit d’ailleurs que cette tâche la mène vers la folie… seul le lirium, un métal précieux dont l’empire dispose en abondance, permet à celui-ci d’entretenir une armée sans scrupule.
Dans ce contexte, nous suivons entre autres Saint-Étoile, un bretteur envoyé à la rencontre d’un mystérieux chef mercenaire ; Maëve, une sorcière des Havres, partie implorer la protection des ports auprès de l’impératrice ; Wens, un jeune clerc envoyé au bagne après avoir eu une relation avec l’une des filles de l’empereur… et beaucoup d’autres, dont les trajectoires conjuguées vont donc aboutir à la chute le l’empire vacillant.
Le style est bon, les événements se succèdent à un rythme soutenu, les fils narratifs sont variés et on suit avec plaisir les péripéties qui nous emmènent vers la fin du roman. La base historique du récit est bien posée et réserve son lot de surprises et de révélations. Mais arrivé à la conclusion, le bât blesse : la fin de certains fils narratifs est téléphonée, d’autres se concluent trop vite. Notamment les scènes de combat sont expédiées, certains événements importants ne sont pas notés par ceux qui en sont témoins, des personnages ont subitement stagné alors qu’ils avaient commencé à évoluer…
Certes, tous ces aspects « passent » durant la lecture, car l’auteur possède un vrai talent de conteuse. Mais la fin est trop rapide, le roman est tellement foisonnant qu’il raconte presque trop de choses, on a l’impression qu’un nombre de pages limite était demandé et qu’il a fallu tasser pour faire tout rentrer. Il aurait peut-être fallu ne pas présenter le point de vue de certains personnages. Cette multitude de petits défauts fait des Seigneurs de Bohen un roman agréable, mais pas encore le grand roman qu’Estelle Faye écrira un jour.
Chronique d’Olivier « 1091 » Bourdy
Nous en pensons
Notre avis
3,0
Le style est bon, les événements se succèdent à un rythme soutenu, les fils narratifs sont variés et on suit avec plaisir les péripéties qui nous emmènent vers la fin du roman. Mais la fin est trop rapide, le roman est tellement foisonnant qu’il raconte presque trop de choses. Cette multitude de petits défauts fait des Seigneurs de Bohen un roman agréable, mais pas encore le grand roman qu’Estelle Faye écrira un jour.