« Avatars, récits d’avenirs » de Orson Scott Card

recitsdavenirs_orsonscottcardLes Récits d’avenirs regroupent sept nouvelles d’Orson Scott Card, certaines écrites il y a déjà longtemps quand il n’était « qu’un adolescent qui jouait à l’écrivain » comme il le dit lui-même ! Le dernier récit du recueil,  » L’Originiste  » sur lequel on reviendra ultérieurement, est quant à lui un magnifique hommage à Isaac Asimov. Les nouvelles sont toutes éclairées par les commentaires de l’auteur qui se penche sur celles-ci avec l’expérience des années d’écriture.

Les six premières nouvelles du recueil sont assez cyniques et les avenirs qui nous sont présentés ne sont pas des plus agréables. On y rencontre des personnages solitaires par dépit, déphasés par rapport à une société encore plus cruelle que de nos jours. Peut-être en raison de la  » jeunesse  » de certains textes ou parce qu’on s’attache facilement à ces personnages perdus, on est souvent déçu par la chute des nouvelles. Orson Scott Card est aussi un moraliste, et pour dénoncer certains travers il frappe dur. La nouvelle Mille morts va très loin dans la violence et le sadisme, mais ce n’est jamais gratuitement et la dureté du récit est aussi forte que le message de liberté qu’il véhicule.

Les commentaires de l’auteur sur Trottecaniche éclairent le récit de façon tellement intéressante qu’il faut peut-être les lire avant le récit : Orson Scott Card s’essaie en effet au cyberpunk, mais à sa façon, ce qui donne un résultat des plus surprenants. La poésie douce-amère de «A moins que l’âme ne tape dans ses mains» contraste avec l’humour délirant d’une invasion pacifique de la Terre par des extraterrestres dans «A la niche». «Retour aux sources» nous donne une occasion de nous faire peur avec les progrès actuels en génétique et les dérives qui peuvent en découler. Enfin, l’idée de base de «Faisons comme si ce n’était pas vrai» est si cauchemardesque et absurde que le lecteur se retrouve emporté par le délire de l’auteur en espérant voir où tout ça le mènera.

Le style, qui mêle à la fois un humour très noir et la sincérité de personnages perdus dans un monde absurde, peut rappeler à certains récits délirants d’Asimov (je pense par exemple à «L’Amour vous connaissez ?» ou «Au Prix du papyrus»…). Disons plutôt que l’auto mise en scène de l’auteur et sa sincérité dans ses postfaces rappellent le ton d’Asimov dans ses propres textes. Mais Orson Scott Card a bien son style à lui et ses propres expériences nourrissent énormément ses récits. L’humour de l’auteur est présent dans les pensées et les réflexions cyniques de ses personnages. Il montre une capacité étonnante à aborder différents sujets, à aligner les idées originales qui structurent un récit ponctué de piques d’un cynisme (ou d’une clairvoyance c’est selon) sans borne.

«L’Originiste», qui se déroule dans l’univers de Fondation créé par Isaac Asimov, se détache nettement des autres nouvelles. Orson Scott Card réalise ici un de ses rêves en empruntant le style d’un des maîtres de la science-fiction et l’on peut imaginer qu’il porte un soin tout particulier à ce texte. Je dois avouer que je suis tombé sous le charme de ce récit : non seulement on a le plaisir de retrouver Trantor, Harry Seldon et l’univers de Fondation mais, en prime, l’auteur nous livre une histoire riche qui respecte l’univers d’Asimov. Ce texte s’imbrique dans ce décors gigantesque et cohérent mais l’auteur ne se contente pas d’apporter une petite pierre à cet édifice. Les réflexions métaphysiques qu’il prête à ses personnages et la profondeur du texte sont d’un optimisme qui tranche avec les premières nouvelles. Comme il le dit dans sa préface on retrouve ici son espoir de changer le monde par l’écriture.

Je vous conseille donc vivement la lecture de ces Récits d’avenirs, en particulier celle de la dernière nouvelle qui ravira tous les inconditionnels d’Isaac Asimov. A noter d’ailleurs que ce texte est aussi présent dans Les Fils de Fondation (Presses de la cité).

Chronique de Chroniqueur

Éditeur L’Atalante
Auteur Orson Scott Card
Pages  300
Prix 13€

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