En 2089, tous les habitants de la Terre sont reliés et soumis au réseau de surveillance de leur gouvernement, hormis quelques zones franches où vivent des marginaux.
Et puis, il y a les territoires inuits. Pas de surveillance ou presque, de grands espaces sauvages et une culture préservée. Les autres Nations Premières, nations encore habitées par leurs peuples indigènes, s’inspirent de cette autonomie et veulent en bénéficier également, au grand dam des pays les plus puissants qui tentent de comprendre cette indépendance inuit, liée, semble-t-il, aux narvals et à leur sonar très particulier.
Tout commence avec une jeune chercheuse inuite, Kisimiippunga, qui s’adonne au rite ancestral de la Première Chasse. Seule sur l’immensité de glace, elle voit surgir un traîneau sur lequel gît un européen, gravement blessé. En parallèle, du côté de Montpellier, les services de sécurité nationale paniquent : l’un des leurs a disparu et des territoires entiers s’effacent des radars.
Entre roman d’anticipation et thriller, chamanisme et high-tech, Lilian Bathelot nous offre un récit mené de main de maître, qui interroge tant sur les dérives politiques de la technologie que sur l’écologie. La comparaison cyber-surveillance versus retour à la nature et modes de vie ancestraux pose un cadre d’analyse intelligent, qui montre que l’un et l’autre ne sont pas si opposés.
L’écriture subtile oscille entre contemplation, côté Inuit, et scènes d’action nerveuses, côté police française. Le suspense est maintenu, le rythme ne faiblit pas et le livre parvient à trouver un équilibre entre réflexion et péripéties. Les personnages sont profonds et l’on s’y attache rapidement ou on les déteste !
La fin se révèle particulièrement touchante et le message, subtil et intelligent, est un manifeste pour le respect des autres et de la nature, ainsi que la réconciliation entre science et cultures ancestrales. Mention spéciale pour le magnifique titre !
Chronique de Sylvie ‘822’ Gagnère