« Les Naufragés de l’institut Fermi » d’André David

Sur l’île de Bréhat, au XXIVe siècle, l’institut Fermi, contrôlé par les mystérieuses moires, envoie ses agents dans le passé pour sauver l’Humanité d’une disparition pure et simple dans un avenir assez proche – selon l’une des hypothèses du physicien italien naturalisé américain, Enrico Fermi (1901-1954), pour expliquer pourquoi nous n’avons jamais rencontré d’extraterrestres.

Plus exactement, l’institut Fermi utilise une technologie qui, en plaçant des Dériveurs dans des conditions de stase particulière, permet d’envoyer leur conscience dans le corps d’individus d’autres époques, mais qui sont leurs doubles génétiques. Et c’est le XIXe siècle et ses guerres qui concentrent tous leurs efforts, même si les Dériveurs n’ont pas accès aux plans des moires pour empêcher l’Humanité de s’autodétruire et ne comprennent pas forcément ce qu’on leur demande de faire.

Bien plus loin dans le futur, l’ancien institut Fermi a disparu, mais abrite à présent une ruche dont les clones sont organisés pour survivre dans un monde presque mort, recouvert d’une épaisse couche de glace. Certains d’entre eux ont la capacité de voyager physiquement dans le passé et s’efforcent de contrecarrer les entreprises néfastes des Dériveurs.

Louis, le Dériveur, craint par-dessus tout que ses changements affectent les quelques êtres qui lui sont chers, alors même qu’il sait ne pas devoir s’attacher à ses semblables. Il partage néanmoins beaucoup avec Ángel et Casimir, deux autres Dériveurs. Gwenn, elle, a réussi à s’échapper d’un transport de clones et a rejoint une ruche dissidente, enfouie dans ce qui fut l’île de Bréhat. À force de volonté, elle devient une Voyageuse sous les ordres d’Erwann, lequel voit bien plus loin que son chef, Darass. Et l’une de ses missions l’amène à croiser Louis dont elle devait contrecarrer les plans, mais qui parvient à la blesser…

Le récit au présent et à la troisième personne alterne entre les points de vue de Louis et de Gwenn, dont les missions semblent obéir à un but identique – sauver l’Humanité d’elle-même en modifiant le passé –, alors que, étrangement, ils s’opposent l’un à l’autre pour obéir aux ordres de leurs supérieurs. Les deux protagonistes se débattent chacun dans une réalité oppressante voire oppressive, qu’ils fuient lors de leurs missions dans le passé.

Ils en reviennent nostalgiques d’un monde et d’époques à jamais disparues, mais dont l’altération modifie aussi leurs souvenirs et leur présent. Chacun à sa manière, ils cherchent à donner du sens à leur existence absurde, à comprendre ce qu’on attend d’eux. Cela va les pousser à remettre en question leurs ordres, le bien-fondé de leurs missions. Il se dégage donc de ce roman une étrange et forte mélancolie, en grande partie due à ce surplomb post-apocalyptique qui rend enviable un passé disparu, mais pourtant côtoyé, vécu par des Voyageurs et des Dériveurs venus d’époques situées après la fin de l’Histoire.

Si l’on peut regretter de ce fait que ces deux présents éloignés dans l’avenir paraissent assez inconsistants, peut-être même insuffisamment crédibles et élaborés, cela se justifie narrativement. Malgré quelques longueurs, on s’attache aux personnages et on se demande comment les humains en ont été réduits à devenir des clones vivant selon le modèle des ruches, comment l’Humanité va échapper à son destin : sa disparition. Même si l’on ne parvient pas complètement à s’immerger dans cette histoire vraiment sombre, c’est un premier roman plutôt réussi !

 

Chronique de François ‘767’ Manson

 

Nous en pensons

Notre avis

3,5

Sur l’île de Bréhat, au XXIVe siècle, l’institut Fermi, contrôlé par les mystérieuses moires, envoie ses agents des dériveurs dans le passé pour sauver l’Humanité d’une disparition pure et simple dans un avenir assez proche. Bien plus loin dans le futur, l’ancien institut Fermi a disparu, mais abrite à présent une ruche dont les clones sont organisés pour survivre dans un monde presque mort, Nous suivons l'aventure de Louis le dériveur et de Gwenn le clone. Même si l’on ne parvient pas complètement à s’immerger dans cette histoire vraiment sombre, c’est un premier roman plutôt réussi !

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A propos de Christian

L'homme dans la cale, le grand coordinateur, l'homme de l'ombre, le chef d'orchestre, l'inébranlable, l'infatigable, le pilier. Tant d'adjectifs qui se bousculent pour esquisser le portrait de celui dont on retrouve la patte partout au Club. Accessoirement, le maître incontesté du barbecue d'agneau :)

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