Votes pour le match d’écriture des Imaginales 2019 : « Un mythe par jour »

Voici un thème que l’on connaît déjà, que l’on a déjà croisé sur notre chemin. Il fut très bien traité. Aujourd’hui, nous avons constaté que peu de contraintes avaient été choisies. D’expérience c’est plutôt risqué 🙂 Nos candidats du jour sous pression vont-ils s’en sortir ?

  • Le prix d’une tête
  • Au réveil, il était midi
  • Traverser l’opaque
  • Fabulavore
  • Parce qu’il y a toujours une vieille…
Contrainte 1
Coincé dans une faille temporelle
Contrainte 2 Un vieux Parrain/vieille Marraine

LE PRIX D’UNE TÊTE

*

« Mon cher Dan, ça me fait plaisir de te voir, tu m’aurais déçue en refusant mon offre », entonna une voix de femme mielleuse.
J’aurais jamais dû accepter ce contrat. Au début ça semblait être un bon plan, bien rentable, mais en y réfléchissant bien ça puait le traquenard dès le début. Déjà, traiter avec une Marraine n’était pas quelque chose de très recommandé, alors avec Yngrid, dite la Doyenne, c’était l’emmerde assurée. Mais bon, il faut bien continuer de vivre, et de toute façon je ne peux plus revenir en arrière, la vielle femme devant moi n’hésiterait pas à me faire descendre par ses deux gorilles si je me désiste maintenant. Elle sortit un petit disque à crédits.
« Voilà qui couvrira ton déplacement et l’achat de matériel. Je veux les têtes de l’hydre de Lerne. »
Je récupère le disque et me retire. Je pourrais essayer de me débiner maintenant, mais ça vaut peut-être le coup de faire le boulot, peut être que cette fois sera la bonne, je verrai bien dans 24 heures.

*

La chasse à la prime c’est plutôt mon rayon, mais ramener la tête d’une hydre, c’est de suite plus compliqué. Huit fois plus de travail. Huit fois plus de risque. Huit fois plus de paperasse. Je regarde l’horloge, plus que dix heures. Heureusement que le sourire du type au guichet vaut le détour, ça apporte un peu de frais dans l’enfer de lenteur de mes demandes d’autorisations.
« Avec ces Trois derniers dossiers, vous êtes bons. Bonne chasse. »
Je souris bêtement, fais un signe de tête, et me rends au centre de téléportation.
Avant, j’aimais bien cet endroit. Ça me plaisait de voir des gens affairés entre les différents terminaux de transports, de ce fatras humain aux yeux rivés sur les panneaux holographiques. J’aimais ressentir le trémolo émotionnel des retrouvailles ou des séparations, la tension omniprésente des retardataires ou de ceux dont le transfert était retardé. Mais à force, on s’en lasse, et maintenant je marche, machinalement moi aussi, à l’affût de mon objectif, la porte 134, direction les contreforts du mont Olympe.
Après avoir esquivé un extorqueur de bas étage, j’atteins enfin ma destination. Sous les chiffres luminescents, un vortex hexagonal d’une trentaine de mètres de diagonale charge pendant que les voyageurs s’agglutinent devant. De mon côté je prends une file sur le côté qui mène à un passage à accès limité, c’est plus cher, mais les braillards et autre énergumènes, très peu pour moi. Là c’est chacun son tour, à une fréquence correcte, et avec une plus grande flexibilité sur la porte d’arrivée.
À mon tour, je pose mon pouce sur l’interface tactile et subit un scan rétiniens.
« Bonjour utilisateur Dan Erret. Veuillez formuler votre destination mentalement.
— Mont Olympe, secteur 4. »
Je déteste ces vocalisateurs internes, ça vous hurle dans la boite crânienne pour poser une question qu’un simple bouton aurait suffi à remplacer. Vive la modernité… La porte active ses convoyeurs quantiques et l’horizon bleuté du téléporteur apparaît devant moi dans un crépitement électrique. Un voyage instantané c’est jamais vraiment marrant, mais on s’y fait, quelques années plus tôt j’aurais hésité, mais maintenant le contact tranchant de du voile bleu ne m’incommode plus tellement. Après avoir été découpé en sashimi par la machine et reconstitué de l’autre côté la voix raisonna de nouveau dans ma tête.
« Mont Olympe, secteur 4. Date  : 12 mars 3006 – 14:23 »
Plus que huit heures.

*

Ça sent mauvais, vraiment. Si je tenais les concepteurs du réseau de téléportation, je leur ferais comprendre à coup de taser, pourquoi c’était une mauvaise idée de mettre une sortie dans un marécage. Délaissant ma frustration contre les transports publics, je sors mon radar et suis ses indications pour traquer la créature mythique. La végétation est si dense que je suis obligé de taillader à grands coups de lame ionisée, l’entretien a dû être abandonné par le gouvernement grec depuis longtemps. Faut dire que ça a un avantage, au moins ici on peut entendre la vie sauvage sans aucune pollution humaine, la biodiversité à du grimper en flèche depuis qu’on a laissé l’environnement tranquille.
Je repère une falaise suffisamment haute pour installer mon dispositif de capture et je déballe le matériel. Piège sonique, appâts adaptatifs et surtout, ma planque à neutralité sensorielle. Avec ça la bête sera attirée sans qu’elle ne me repère, puis elle sera immobilisée, il ne me restera plus qu’à sectionner les têtes et ce sera bon ; normalement ma faux à cautérisation instantanée devrait prévenir la régénération de cette saleté. Une fois tout en place, je m’installe dans ma cache et regarde ma montre ; plus que trois heures.

*

C’est lent une hydre, je vous assure. Elle était sortie de la crevasse qui l’abritait après près de deux heures et demi d’attentes et voilà vingt minutes qu’elle se traîne vers mon appât. Heureusement que j’ai quelques seringues pour me maintenir à l’affût parce que le spectacle a de quoi assommer un hyperactif shooté à la cocaïne. Ses cris stridents raisonnaient avec une mollasserie incroyable et les bruits de son corps traînant n’avait rien de bien glorieux non plus. Tu parles d’une légende, en voyant ça j’ai juste l’impression de voir une grosse limace qui grince.
Enfin elle est prise au piège ! Je m’approche d’elle, sort ma faux et d’un revers je tranche les huit têtes. C’est quand même fou cette odeur de menthe poivrée qu’a le sang d’hydre. S’il me restait plus de temps, j’aurais peut-être pris un échantillon pour voir si on ne pouvait pas s’en servir comme condiment, mais le cumul de l’administratif plus hydre avait drainé mon temps comme un vampire vide ses proies. Je me serais bien remis en route pour le téléporteur, mais je n’ai plus de tem…

*

« Mon cher Dan, ça me fait plaisir de te voir, tu m’aurais déçue en refusant mon offre », entonna une voix de femme mielleuse.
Je regarde ma montre : 11 mars 3006 – 22:23. Je jette un regard lassé à la Marraine Yngrid qui me lance un disque de crédit.
« Voilà qui couvrira ton déplacement et l’achat de matériel. Je veux la tête du centaure Chiron.  »
Et c’est parti pour ma 243e chasse. J’aurais vraiment jamais dû accepter de ramener la tête de Chronos la première fois.

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