Les récits de La Terre mourante prennent place au crépuscule de l’Humanité, alors que les éons ont succédé aux éons et qu’un soleil rouge et finissant semble près d’abandonner à chaque instant sa course dans le ciel.
Les campagnes sont dangereuses et parsemées des ruines de cités antiques, tandis que les villes sont des melting-pots de peuples et de races qui vivent un nouvel âge médiéval habité de magie et des religions les plus diverses.
La composition des textes de la série est caractéristique de l’édition du milieu du siècle dernier. Elle regroupe deux recueils de nouvelles, un fix-up et un roman. La rédaction de l’ensemble court de 1950 à 1984. Mnémos met les petits plats dans les grands avec cette édition à la couverture rigide illustrée par Julien Delval et augmentée d’une très jolie carte (ce qui a évidemment un coût).
Le cadre est planté avec le recueil Un monde magique, le plus réussi de l’ensemble selon l’auteur de ces lignes, avec ses paysages hauts en couleur et ses personnages qui usent d’une langue particulièrement soignée et plaisante à lire. Le charme des décors languides et de l’ambiance surannée est une constante caractéristique de la série et la distingue nettement de l’œuvre de Tolkien, parue quinze ans après et d’un abord plus intellectuel.
La beauté de la langue ne masque pas cependant la violence et la cruauté de ce monde, où magiciens comme bandits de grands chemins peuvent être singulièrement cyniques et user de tout et de tous comme bon leur semble, en particulier des femmes qui seront au long des différents récits à venir tour à tour des proies, des objets sexuels ou de simples monnaies d’échange.
Avec Cugel l’astucieux puis le roman Cugel Saga, la série devient moins contemplative et fait place aux aventures picaresques de Cugel l’autoproclamé « astucieux », aventurier roublard mais particulièrement naïf en plusieurs occasions. Pour avoir tenté de faire un mauvais coup à un magicien sévèrement retors, Cugel va devoir vivre une longue odyssée qui le mènera à travers montagnes, déserts et océans à la rencontre de peuples et de personnages tous très singuliers.
Si le vocabulaire reste luxuriant lorsqu’il s’agit de décrire la grande variété des pays traversés, le récit est davantage iconoclaste et le ton se fait narquois. Le héros est à l’occasion particulièrement désagréable et rend difficile l’empathie qu’on peut éprouver pour lui lorsqu’il se montre davantage malin et inventif. Pour finir, le recueil Rihalto le Merveilleux nous plonge, en trois récits précédés d’un prologue,au sein d’un cénacle de magiciens à la toute fin des temps.
S’il est plaisant de retrouver des dialogues particulièrement savoureux, le verbiage confine parfois à la logorrhée et les histoires, toutes basées sur la jalousie et les petitesses des magiciens les plus puissants de leur temps, sont moins enthousiasmantes que les précédentes. Au total, Jack Vance invente sur près de sept cents pages un monde original, flamboyant et boueux à la fois, avec lequel il illustre avec brio les passions humaines les plus viles, telles l’avarice ou la mégalomanie. Une lecture mémorable.
Chronique de David ‘1934’ Soulayrol
Nous en pensons
Notre avis
4,1
Les récits de La Terre mourante prennent place au crépuscule de l'Humanité, alors que les éons ont succédé aux éons et qu’un soleil rouge et finissant semble près d'abandonner à chaque instant sa course dans le ciel. Les campagnes sont dangereuses et parsemées des ruines de cités antiques, tandis que les villes sont des melting-pots de peuples et de races qui vivent un nouvel âge médiéval habité de magie et des religions les plus diverses.