« La Peste écarlate » de Jack London »

La Peste écarlate a été écrite en 1912 et publiée en France en 1924. Sa réédition en pleine pandémie révèle son éclatante modernité – même si l’épidémie qu’elle évoque est infiniment plus dévastatrice que la Covid.

Cette peste écarlate, ainsi nommée parce qu’elle provoque une coloration rouge vif de la peau des personnes atteintes, est terriblement contagieuse, et effroyablement mortelle : elle tue tous ses porteurs, en quelques minutes, ou en quelques heures.

En peu de temps, elle a totalement désorganisé toute la civilisation et quasiment rayé l’espèce humaine de la surface de la Terre. Soixante ans plus tard, un vieux professeur d’université, sans doute l’un des derniers survivants de l’époque d’avant, survit, en compagnie de ses petits-fils. Vêtues de peaux de bêtes, quelques hordes d’humains subsistent, qui ont recréé une néo-préhistoire, où la lecture et l’écriture se sont perdues, ainsi que l’agriculture, et, bien entendu, toutes les technologies.

Le vieil homme entreprend de raconter le monde d’avant à ses petits-fils, même si une grande partie de son récit leur reste incompréhensible. Il raconte comment ses contemporains ont tenté de survivre, les lâchetés, mais également les actes de bonté ; il raconte comment il a dû s’intégrer à une des bandes de survivants, comment il a assisté, impuissant, au retour de la barbarie.

Le texte est un formidable appel à la vigilance, parce que les prémisses de la catastrophe étaient là avant, parce que nos civilisations sont des colosses aux pieds d’argile, et l’humain toujours prêt à retomber dans la bestialité. Les thèmes chers à l’auteur sont présents, sur fond de pessimisme écrasant.

Le vieil universitaire est certain que « les hommes se multiplieront, puis ils se battront entre eux.  […] les trois types éternels de domination, le prêtre, le soldat, le roi y repartiront d’eux-mêmes. » Il a vu à quelle vitesse la société s’est effondrée lorsque la loi du « sauve -qui-peut » a dominé l’entraide et la solidarité. Pourtant, une lueur d’espoir l’habite encore : il a dissimulé dans une grotte secrète des livres, ainsi qu’une méthode d’alphabétisation, pour qu’un jour, peut-être, les hommes réapprennent à bâtir et à construire.

On retrouve le talent de conteur de Jack London, son écriture incisive, qui parvient à rendre profonds et attachants même ces demi-sauvageons. On se laisse entraîner par une narration rythmée qui croque en quelques mots personnages et situations.

L’auteur excelle à décrire les décors, et à donner vie aux péripéties de son récit. Portée par un humanisme indéniable, guidée par une lueur d’espoir que ne saurait éteindre la noirceur ambiante, servie par un style remarquable, La Peste écarlate est d’une formidable actualité.

Chronique de Sylvie ‘822’ Gagnère

A propos de Christian

L'homme dans la cale, le grand coordinateur, l'homme de l'ombre, le chef d'orchestre, l'inébranlable, l'infatigable, le pilier. Tant d'adjectifs qui se bousculent pour esquisser le portrait de celui dont on retrouve la patte partout au Club. Accessoirement, le maître incontesté du barbecue d'agneau :)

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