Ce roman paru en 2012 dans la collection Absinthes, éthers, opiums de l’éditeur Malpertuis – sa collection dédiée à la littérature fantastique inspirée par le dix-neuvième siècle – nous emmène dans un curieux manoir d’un univers gothique et romantique, en compagnie d’un peintre accro à l’absinthe,. On y retrouve tous les éléments de ce genre de littérature : l’ambiance lugubre, la grande bâtisse pleine de mystère, le personnage de l’artiste et celui de la jeune femme passionnée cherchant à échapper à son environnement bourgeois…
Le roman commence bien. La sensibilité très visuelle du personnage se retrouve dans le style, qui évite la sécheresse des descriptions purement cinématographiques. Tous les sens y sont flattés, et grâce à la poésie et à la maîtrise du style, nous plongeons dès l’ouverture du récit dans une atmosphère automnale, à la fois mélancolique et sinistre.
Mathias Yequel, un jeune peintre parisien qui entretient une relation pathologique avec l’absinthe, répond à une offre d’emploi et est embauché au manoir d’Herberay pour réaliser des portraits de la famille. Il y rencontre la vieille Elisène, une curieuse femme dont l’âge n’a rien ôté à la grâce. Il fait également la connaissance d’Ange, un petit garçon aveugle, inquiétant, et dont la flûte semble posséder des pouvoirs hypnotiques. Au village, il croise Paule Maubant, qui travaille à la droguerie et s’ennuie dans sa vie bien rangée. Le jeune peintre ignore encore que l’aide de la jeune fille lui sera indispensable pour affronter les nombreux dangers d’Herberay.
Lesquels sont finalement quelque peu décevants. Si l’histoire a aussitôt éveillé mon intérêt, j’ai ensuite commencé à être agacée par la naïveté des personnages, une naïveté telle que l’on passe des pages à les rabrouer intérieurement : « Mais enfin, c’est évident ! » a-t-on envie de leur crier lorsqu’ils peinent à comprendre ce qui leur arrive.
Ensuite, et c’est pire, j’ai eu la désagréable impression de passer peu à peu du conte fantastique à la production hollywoodienne. Le mystère d’Herberay manque de subtilité, et à mesure que l’on approche de la fin du roman, les personnages perdent leurs couleurs et ne sont plus que des rouages dans la mécanique de l’intrigue. Dès lors, tout semble trop facile, un peu grossier.
Le roman reste cependant d’une lecture agréable, et si je me suis un peu agacée, je ne me suis pas ennuyée. Malgré ses défauts, je le recommande aux amateurs de fantastique, ne serait-ce que pour la belle plume qui l’a composé.
Chronique de Muriel Georges