« Les Enfers Virtuels » (tomes 1 & 2) de Iain Banks

Les enfers virtuels-iainmbanksPour les amateurs de Iain Banks, un nouveau roman du cycle de la Culture est toujours un petit événement…1 Un petit rappel de ce cycle pour les néophytes : la Culture est une civilisation galactique, tolérante – au moins en apparence –, hédoniste – la population majoritairement humaine se vautre dans les plaisirs, tandis que l’intendance, les affaires politiques et la guerre sont gérées par des Intelligences Artificielles – et… totalement persuadée d’être l’idéal de toute société, donc décidée à répandre sa bonne parole dans le moindre recoin du cosmos.

Ce coup-ci, c’est donc contre les enfers virtuels que la Culture part en croisade. Ces enfers se révèlent être une punition en vigueur dans un certain nombre de sociétés galactiques, lesquelles condamnent les mauvais citoyens aux affres de tortures sans fin que subissent leurs âmes numérisées après leur mort. Partisans et opposants à ces enfers se livrent une guerre sans merci, bien que circonscrite pour le moment aux univers virtuels ; mais les abolitionnistes, qui sont en train de la perdre, cherchent à amener cette guerre dans le monde réel…

Le programme a l’air alléchant pour ce nouvel opus. Ce long roman s’ouvre sur Ledjedje, une jeune femme qui a été intaillée, c’est-à-dire tatouée au niveau cellulaire : un immense tatouage fractal d’une précision ahurissante recouvre toute la surface de son corps. Elle appartient à Veppers, l’homme le plus riche de « l’habilitement Sichultien », qui l’a « gagnée » en paiement d’une dette d’affaires contractée par le père de Ledjedje.

Et donc, au début, Ledjedje… meurt, assassinée par Veppers pour l’avoir blessé en essayant de s’enfuir. Ressuscitée par la Culture, elle part dans une quête de vengeance contre son meurtrier.

Comme souvent avec Banks, l’histoire suit en parallèle les pas de plusieurs protagonistes : Ledjedje donc, et ses tribulations pour revenir sur son monde et se venger, mais aussi Yume, une Culturienne qui a eu vent des projets de la jeune femme et cherche à les empêcher, et d’autre part Veppers ainsi que plusieurs protagonistes de la croisade des opposants aux enfers. Tous ces chemins, bien sûr, vont se rejoindre à la fin… mais de manière pas franchement convaincante.

Certes, Banks sait y faire : les passages en enfer sont quasi insupportables et rappellent certaines pages de ses romans dérangeants comme EntreFer, les traits d’humour sont réussis, certaines scènes et notamment la fin sont pleines de suspense… mais la narration est alourdie par un grand nombre de scènes qui ne font que peu ou pas avancer l’action. L’intrigue qui suit la guerre pour l’abolition des enfers est quasiment inexistante, et est écrasée par la très simple affaire de vengeance de Ledjedje. Le lecteur croyait lire une plongée abrupte dans des enfers créés par Banks ; il a droit à quelques visions fugaces, mais qui servent de décor plus qu’autre chose.

Au final, le dernier roman de la Culture ressemble à un mauvais film de Tarantino : bien écrit, souvent bien joué, mais longuet, creux et, au final, on se demande pourquoi l’auteur l’a écrit, si ce n’est pour gonfler encore un peu son portefeuille.

Il est sans doute un peu cruel de finir la chronique sur une note semblable ; après tout, ce roman en deux tomes se lit bien et est parsemé de bonnes scènes et idées. Mais pour commencer le cycle de la Culture, il est beaucoup plus conseillé de lire les premiers et excellents opus que sont L’Homme des jeux ou Une forme de guerre.

Note : 1. Surtout que celui-ci restera le dernier, vu que l’auteur est décédé. (NdR)

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A propos de Olive

Pilier du Club, Olivier fait partie des anciens et continue à faire vivre AOC, le recueil de nouvelles trimestriel, dont il est le maquettiste et rédacteur en chef. A l'occasion, Olivier publie aussi des nouvelles, participe aux salons, à d'autres revues, rédige des articles dans PdE, gère le site Internet, etc. Dans le milieu, on le surnomme le Shiva de l'imaginaire !

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